Courir - Lebon Trait d'union

Par Isabelle Millaire

Il y a deux étés de cela, je me suis mise à courir.

Pourquoi courir?

D’abord pour essouffler le hamster dans ma tête qui s’affolait pour un tout et pour un rien.

C’est que lorsque je m’épuise physiquement, Hamster se calme, lui aussi. Et pourquoi j’aime que Hamster soit au ralenti ou carrément endormi? Eh bien, parce que c’est lui qui me parle constamment de ce que je devrais faire. De ce que je n’aurais pas dû faire. C’est lui aussi qui me regarde avec des yeux tout sauf tendres. C’est lui, Hamster, cette petite voix poche qui me dit que je suis molle. Que je devrais me muscler. Bref, c’est lui qui est à l’origine de mon gigaméga sentiment de culpabilité. Donc, quand Hamster fait couche-couche-panier, je respire enfin. Je me trouve enfin correcte. Adéquate. Alléluia!

Ensuite, courir pour retrouver la forme. Cette forme physique négligée dans le tourbillon du quotidien. Je n’ai jamais été une athlète (loin de là). Mais j’ai déjà été plus en shape. (Tiens, voilà que je m’exprime comme mon préado de 9 ans qui aime bien glisser des mots en anglais dans ces phrases: «C’est nice! Il est dead!) Et disons-le, à 40 ans (et des poussières… que je garderai pour moi ;P), j’ai senti comme un rappel à l’ordre; mon énergie était à la baisse. Des gens autour de moi développaient des petits ou gros bobos. Donc, à 40 ans, je reprenais ma santé en main.

Puis, et surtout, courir par plaisir.

 

 

Oui, ce qui au départ a été entrepris par utilité, voire nécessité, a été poursuivi simplement pour le plaisir. Un plaisir un peu étrange, quand on y pense, puisqu’il consiste à mettre un pied devant l’autre sans destination précise. Courir, au fond, c’est tourner en rond: on part du point A, on passe vite (dans mes rêves en tout cas!) par B et C, pour finalement revenir au point A (c’est que je finis toujours par revenir à la maison!)

Encore cette image du hamster. Un hamster qui court dans sa roue. Mouvement perpétuel qui ne le mène nulle part, mais qui l’occupe et l’amuse assurément puisqu’il recommence jour après jour! D’ailleurs, on dit souvent que ce qui compte, ce n’est pas la destination, mais le voyage pour s’y rendre. Et courir prend parfois des allures de voyage; de voyage intérieur.

Un voyage silencieux aussi, même si parfois une musique entraînante martèle nos oreilles pour guider nos pas. Et un voyage en solitaire car courir, c’est entrer dans sa bulle. Courir, même s’il y a des gens autour, c’est un tête-à-tête avec moi-même. Avec mes pensées.

Courir, c’est donc un peu (beaucoup) peser sur pause. Une pause en mouvement, certes, mais une pause quand même. La preuve, il m’a fallu mettre la course «officiellement» à mon horaire pour pouvoir m’y adonner de façon régulière. Sinon, il y avait toujours autre chose à faire. Cette pause active planifiée, c’est un peu comme un rendez-vous que je prends avec moi-même.

Pour toutes ces raisons, peu importe la pluie. Peu importe le vent. Peu importe la chaleur. J’enfile mes souliers de course. Je sors. Et je cours.

juin 10, 2020 — Isabelle Millaire

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