Pourquoi le Japon.

Par Hélène Lebon

Ah! Cette question! Combien de fois l’ai-je entendue… Cette fascination pour le voyage et aussi pour le Japon, les «Japons» pourrait-on dire d’ailleurs, je comprends qu’elle puisse étonner. Elle est là pourtant, profondément ancrée en moi, ni bercée d’illusion, ni rationnelle, comme un cri du cœur, un appel des tripes. Je ne suis allée au Japon que tardivement dans ma vie, après avoir exploré d’autres pays et parlé d’autres langues. Et pourtant.

La rencontre avec le Japon

Et pourtant, quelle rencontre! D’abord, j’ai rencontré le Japon à travers la littérature, et je n’ai pas été déçue de la liste des livres que j’avais lus avant d’y aller. J’ai toujours aimé sa poésie humble mais puissante, ses intrigues douces mais profondes, sa poésie suspendue qui joue avec nos sentiments comme un funambule de ligne en page. 1Q84, la péninsule au 24 saisons, et tant d’autres sont des romans dont je garde un souvenir ineffaçable, presque un idéal de vie à saupoudrer dans la mienne. J’ai aussi rencontré le Japon à travers des essais, des expositions comme celle d’Hokusai au Grand Palais à Paris, il y a quelques années. J’aime le Japon car il semble être tout et son contraire dans une fabuleuse chorégraphie sociale, une fresque en soi, insaisissable et pourtant harmonieuse. Et aussi parce que je m’y sens bien.

 

Reina Sakao et Suemarr - Lebon Trait d'union

 

Mais j’ai aussi rencontré le Japon à travers les Japonais. Reina Sakao, Madame Matcha, avec qui j’ai approfondi ma passion et ma connaissance du thé, devenue amie et partenaire d’affaires avec le temps. Je partage avec elle un attachement au Japon et un plaisir très canadien de vivre dans un pays où l’entrepreneuriat pour les femmes est bien plus facile que dans nos pays d’origine encore un peu rigides, on en a parlé dans un podcast d’ailleurs. Il y a aussi Suemarr, dont nous venons de sortir le documentaire. Suemarr, ce musicien chanteur qui a fait la plupart des pièces qui composent la trame sonore de Midnight Diner : Tokyo Stories et que nous avons rencontré à Yokohama en février dernier, mais avec qui je parle sur Instagram depuis presque 2 ans. Et puis Sanae, mon amie designer de mode à Osaka, connue elle aussi sur Instagram et avec qui nous préparons une collection franco-japonaise! 

La rencontre avec l'Asie

Cet amour, cette attirance, cette fascination pour le Japon est le fruit d’un tâtonnement je pense. J’avais 16 ans quand je suis allée au Vietnam faire des articles pour une revue étudiante en France, Typo. On était parti dans des pays en lien avec la francophonie, et j’avais découvert ainsi la Roumanie, le Québec et le Vietnam. C’était en juillet 2001, il faisait une chaleur étouffante et je venais d’apprendre à manger avec des baguettes, planter du riz, me faire soigner par une docteure traditionnelle, boire mes premiers thés au jasmin et des rencontres à dévisser la tête et les préjugés de la gamine que j’étais, bref j’étais tombée en amour avec le Vietnam, avec l’Asie, avec une autre Sagesse.

 

Vietnam - Lebon Trait d'union

 

Le Vietnam a habité mon quotidien quelque temps encore, puis j’ai appris le mandarin pendant un an, eu des amies chinoises et taïwanaises, la vie est ainsi faite, qu’un peu comme un aimant, j’attire ou suis attirée par un coin du monde et ses gens. Puis, j’ai commencé à découvrir le Japon et j’ai eu l’impression de m’y retrouver, d’y reconnaître un écho lumineux, puissant, inénarrable. Mais je sais que mon exploration de l’Asie et du monde n’est pas finie.  

La rencontre avec l'autre

Car après tout, s’il est un trait commun aux voyages et séjours que j’ai vécus à l’étranger, c’est cet appel de l’Altérité. Un grand respect et une curiosité bienveillante à l’idée de découvrir d’autres points de vue, d’autres idées, d’autres humain.e.s. J’ai la chance de parler anglais et espagnol en plus de mon français maternel J’ai pu étudier dans 3 langues et ça me permet de créer facilement des liens quand je voyage, gérer mes entrevues seules, et ouvrir des portes par moi-même. Dans le cas du Japon, c’est un peu différent car je ne parle pas (encore!) japonais. Et en attendant de me débrouiller seule pour lire, écrire, parler, j’ai dû lâcher prise, enlever du cérébral, mettre plus de sensible. Les sens font du sens, laissez-moi vous dire. D’où le projet de mon livre que je crée pour le Japon mais qui, si tout se passe bien, pourrait permettre une série d’explorations sensorielles et sensibles de bien d’autres pays car le monde est aussi vaste que mon envie de le partager!

Je sais, comme je l’ai dit dans mon article “pourquoi je voyage”, que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs, mais là où on l’arrose. Je sais aussi qu’il n’y a d’utopie que dans l’idée que chacun s’en fait car toute société a ses travers et ses points de déraison. Tout n’est pas que grâce et perfection, mais c’est justement en faisant découvrir cette complexité, cette inextricable beauté et faiblesse que l’on prend pleinement la mesure de notre richesse. Alors, serez-vous du voyage?

 

Japon - Lebon Trait d'union

décembre 17, 2020 — Hélène Lebon

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